Pathologies
Le conflit de hanche ou conflit fémoro-acétabulaire correspond à des chocs répétés lors de certains mouvements entre l’extrémité supérieure du fémur et l’anneau acétabulaire. Il est favorisé par des anomalies morphologiques qui entraînent une diminution anormale de l’espace entre ces deux structures. Il s’agit le plus souvent d’un défaut de concavité antéro-supérieure de la jonction cervico-céphalique fémorale. Cette « bosse » vient buter contre le rebord acétabulaire lors des mouvements combinés de flexion et de rotation interne de la hanche, il s’agit de l’effet came (image ci-dessous).
Les chocs répétés entraînent des lésions du cartilage et du labrum (bourrelet acétabulaire) antéro-supérieur dont l’extension fera le lit de l’arthrose. La composante dynamique du conflit explique sa fréquence plus élevée chez le sportif.
Parfois l’anomalie morphologique se situe sur le versant acétabulaire. Il s’agit alors d’un excès de couverture antérieure que l’on rencontre en cas de rétroversion acétabulaire ou de hanche protruse. Ici des lésions cartilagineuses postérieures peuvent se produire par contre-coup dû à un effet de levier sur le rebord antérieur de l’anneau acétabulaire : c’est l’effet pince ou tenaille.
Il semblerait que les 2 anomalies soient fréquemment associées. Leur origine exacte reste incertaine. Concernant le fémur, les déformations en crosse de pistolet (pistol-grip) découvertes chez l’adulte sans antécédent orthopédique infantile connu pourraient s’expliquer par des épiphysiolyses infra-cliniques ou par des anomalies (dystrophies) de croissance de l’épiphyse.
La symptomatologie débute le plus souvent insidieusement. Il s’agit d’une gêne, puis d’une douleur le plus souvent dans l’aine, qui apparaît au cours des activités sportives et persiste de quelques heures à quelques jours après l’effort. Plus rarement, il s’agit d’un traumatisme sportif inaugural, le plus souvent de mécanisme indirect (hyperflexion, pivot…). Le rythme initialement mécanique peut devenir mixte avec le temps. La région inguinale (jonction entre l’abdomen et la cuisse) représente la topographie la plus fréquente. Les douleurs peuvent aussi débuter en région péritrochantériennne (latérale) et fessière, ou plus souvent s’y étendre. Il peut également se produire des phénomènes de ressauts ou pseudo-blocages.
Le conflit par effet came prédomine dans une population essentiellement constituée d’hommes jeunes de la 3e décennie. Les symptômes peuvent apparaître plus tôt, ce d’autant qu’il existe une activité sportive soutenue et à risque. Les sports les plus favorisants sont ceux qui entraînent des mouvements répétés de grande amplitude en flexion et rotation interne : sports de combat, football. Le conflit par effet pince, plus rare dans sa forme isolée, touche majoritairement les femmes.
À la palpation, on peut trouver une sensibilité douloureuse au niveau de la dépression musculaire antéro-latérale, en avant du TFL (tenseur du fascia lata), qui correspond à la partie antérieure de l’articulation. La zone retro-trochantérienne d’insertion des pelvi-trochantériens peut être aussi concernée.
Les amplitudes peuvent être conservées mais on note souvent un déficit de rotation interne en flexion. La flexion dans l’axe peut être limitée et douloureuse à partir de 90°, produisant au-delà un échappement en rotation externe. Le test du conflit antérieur consiste, lorsque le patient est allongé en décubitus dorsal, à placer sa hanche en flexion, rotation interne et adduction. Il est positif lorsque le patient ressent la douleur habituelle, inguinale le plus souvent. Cette manœuvre provoque un contact entre le col fémoral et le rebord antéro-supérieur de l’acétabulum siège de lésions labrales et cartilagineuses. Ce test est plus sensible que spécifique car d’autres coxopathies peuvent s’accompagner de lésions du labrum. Les douleurs peuvent aussi être ressenties et provoquées en rotation externe (ouverture de la hanche). Dans les formes évoluées préarthosiques ou arthrosiques, on observe d’autres signes communs avec la coxarthrose.
Le bilan radiologique va mettre en évidence les anomalies morphologiques osseuses favorisant le conflit et tenter de les quantifier. Il va préciser la topographie des lésions et leur gravité. Il éliminera d’éventuels diagnostiques différentiels.
L’objectif du traitement du conflit est d’une part d’atténuer ou supprimer la symptomatologie et d’autre part de ralentir, voire de stopper le processus arthrosique débutant. Le traitement médical est rarement efficace, il est tenté en première intention de principe. Il associe classiquement les médications antalgiques, anti-inflammatoires et le repos sportif. Les infiltrations peuvent être efficaces temporairement ou en traitement d’appoint.
Le traitement chirurgical s’effectue sous arthroscopie dans une grande majorité des cas. Son principe repose sur la correction des anomalies osseuses qui génèrent le conflit et sur le traitement des lésions articulaires qui en découlent. Les résections osseuses sont limitées : on parle d’ostéoplastie de remodelage. Lorsque le labrum présente une déchirure complexe d’allure dégénérative, il est effectué une résection partielle correspondant à la zone lésée. Lorsqu’il s’agit d’une désinsertion murale avec trophicité conservée, le labrum peut être réinséré. Les clapets cartilagineux instables sont excisés et l’os sous-chondral laissé à nu est avivé et traité par de multiples perforations (micro-fractures) pour obtenir une cicatrice fibro-cartilagineuse. Les greffes de cartilage ou les matrices d’interposition sont indiquées en cas de perte de substance étendue mais sont encore en phase d’évaluation.
Dans les conflits par effet pince avec paroi postérieure de l’acétabulum peu développée, c’est l’ostéotomie péri-acétabulaire d’antéversion (reverse PAO) qui est préconisée.
L’indication du traitement chirurgical quelle que soit la technique utilisée repose essentiellement sur l’impact de la symptomatologie sur la qualité de vie. Lorsque l’arthrose est déjà présente, notamment s’il existe un pincement de l’interligne articulaire, les résultats sont souvent décevants.
Le calendrier de reprise sportive est difficile à standardiser dans cette pathologie articulaire qui touche le cartilage. Il va dépendre de l’étendue des lésions et des traitements associés (suture du labrum, micro-perforations…). En moyenne les activités dans l’axe et en décharge (vélo, natation) peuvent être débutées à partir de la sixième semaine post-opératoire. La course à pied très progressivement entre le 3e et 4e mois. En cas de réinsertion du labrum, les sports de pivot sont déconseillés avant le sixième mois post opératoire.